mardi 13 octobre 2015

Chez moi

Hier dans la voiture, traversant la campagne québécoise incroyablement embrasée par les couleurs d'automne:
"Il m'en aura fallu des années pour l'aimer cette ville".
La phrase est lâchée.

Estrie, automne 2015.

8 ans. C'est le temps qu'il m'a fallu pour aimer cette ville. 8 ans.
8 ans pour admettre que la France n'est plus chez moi. 8 ans pour accepter que le Québec ne sera jamais réellement chez moi. 8 ans pour intégrer que ce n'est pas grave, que chez moi ce n'est pas un lieu.
Chez moi c'est ici, maintenant. Chez moi, ce sont mes racines, mon coeur, moi. Chez moi c'est partout et nulle part.

8 ans, c'est le temps qu'il m'aura fallu pour ne plus essayer de TOUT aimer ou de TOUT détester ici. Non, ça ne me fera JAMAIS tripper sortir quand il fait -40, non, le système de santé ne sera jamais correct, quoiqu'on en dise. Non, je ne serai jamais heureuse de payer mes légumes affreusement chers, non je ne comprendrais jamais les relations amicales et non, je ne me ferai jamais à l'amateurisme sociétal.
Mais oui, j'aime d'un amour fou le mois et demi d'automne qu'on a par an, oui, j'aime la sécurité, le rythme de vie et la bienveillance ambiante. Oui, je trouve ça super fun de tutoyer tout le monde et oui, j'aime ce sentiment de village que j'ai dans mon quartier à Québec. Oui, j'aime cette lumière qui donne des photos incroyables et oui, j'adore pouvoir me balader en fringues de yoga sans me faire dévisager.
Tout n'est pas noir ou blanc.

Le yoga m'a permis de faire la paix avec ça. Le yoga m'a permis de faire la paix avec moi, avec cette voie du milieu qui régit beaucoup de ma vie, mais que j'ai tellement de mal à accepter dans ce sentiment d'appartenance. Entre les critiques des gens qui me reprochent de ne pas toujours voir la vie au Québec en rose et la culpabilité "d'abandonner" mes racines françaises.
J'ai trouvé un équilibre.
Et j'ai trouvé cet équilibre quand j'ai arrêté de le chercher à l'extérieur de moi. Quand j'ai arrêté de vouloir le faire valider par d'autres. Parce que cet équilibre il est en moi. Il est moi.
Quelque soient les circonstances extérieures, moi je suis toujours là, pareille. Et ce sentiment d'appartenance vient de moi, de nulle part ailleurs.
Ce n'est pas facile tous les jours. Ce n'est pas complètement gagné Mais j'y arrive, patiemment.

Mantra du moment:
Je suis chez moi, ici et maintenant.



PS: merci à LaNe qui m'a décidé à publier ce post qui trainait depuis 1 semaine en ayant écrit, genre la même chose (clic), mais en mieux. Les grands esprits... <3

7 commentaires:

  1. Je te comprends, comme si tu savais... Oui, des fois je me transforme un peu en "Office du tourisme d'Ottawa" parce que j'en ai marre d'entendre que la ville est nulle et que Montreal-ou-rien-même-pas-la-peine-d'aller-ailleurs. Mais des fois, qu'est-ce que j'en ai ras-le-cul d'Ottawa... et il y a des choses ici que je n'ai jamais adopté et que non, je n'adopterai pas parce que c'est pas moi. Point. Dans le désordre, l'éducation qui fait des enfants rois, une mentalité conservatrice, aimer l'hiver, consommer à outrance ou le politiquement correct.

    Ça reste que j'ai passé presque la moitié de ma vie au Canada jusque là, et que je suis canadienne aussi. J'aime cotoyer des gens de partout qui ont choisi de vivre ici, j'aime les grands espaces (plus cliché, tu meurs), j'aime le côté enfantin des canadiens qui s'excitent pour tout et rien, j'aime cette idée que tout est possible.

    On est normales, en fait. Juste compliquées dans la tête :-))

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    1. Je ne susi pas certaine qu'on soit compliquée, juste "saines"!
      Si tu savais combien de "bisounours expats" j'ai côtoyé au début qui ne supportaient pas la moindre critique contre le Québec pour finalement "rentrer en France" au bout de 2-3 ans parce qu'ils n'en pouvaient plus!
      On ne peut pas réellement enlever l'esprit critique d'un frenchy je crois, autant l'accepter :)

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  2. 8 ans ! ça fait un bout. Moi ça fait deux mois et demi, et effectivement je ne sais pas trop si j'aime ça ou non.C'est trop tôt je suppose (ton passage sur les légumes me fait sourire, je suis perdue ici dans les magasins du coup je me remet à acheter du non bio parce que c'est trop cher le bio, ici).
    C'est exactement ça, tout n'est pas tout noir ou tout blanc, et ce mantra est pa-rfait : je ne me sentais pas non plus tout à fait chez moi, en France. Et en arrivant ici ce sentiment ne s'est pas volatilisé mais je me suis dis effectivement que dans le fond il vaut mieux penser que chez moi c'est là où je serai bien là tout de suite, même si ce n'est pas toujours facile à se le mettre dans le crâne.
    Dis, ça veut dire quoi "l'amateurisme sociétal" ? :)

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    1. Le blues des 2 mois. Puis le blues des 2 ans. C'est normal! (et oui, c'est trop tôt). Et comme dit, on n'est pas OBLIGÉ de TOUT aimé. J'ai mis du temps à accepter ça.
      Critiquer, admettre ce qui ne va pas, c'est aussi dire qu'on ne s'en fout pas du Québec.
      L'amateurisme sociétal? C'est un truc que j'ai remarqué avec les années. Ici, tout le monde s'auto-proclame "pro" en quelque chose même si, dans les fait, non. Moi qui vient de France et qui se retrouve complètement dans la recherche d'excellence qu'on met en avant tout le temps (trop, on est d'accord), ça picote fort.

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    2. Ok merci pour l'explication :p pour l'instant je n'ai pas le blues, je suis plutôt euphorique du genre "mais comment que tout est mieux iciiiiiii O_O" mais j'ai peur d'avoir un mauvais contre coup suite à ça, tu vois une redescente pas cool XD on verra, au moins je ne suis pas venue seule alors ça sera moins dur ! A la prochaine =) j'aime vraiment ton blog !

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  3. Merci Alice. Ça fait 8 ans pour moi aussi et ton article résonne en moi !

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  4. ouf ! Les larmes aux yeux de te lire mon amie.... 5 ans pour moi, je l'aime ce pays parce qu'il me fait rencontrer des gens si merveilleux jour après jour.... Genre.... Toi.
    Amour xxx

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Un commentaire choupi, et une petite signature, histoire de savoir qui me parle. Merci :)