mercredi 27 avril 2016

Les photos en yoga, l'image que l'on choisi (Partie II)

Je suis vraiment impressionnée par les réactions que j'ai eu suite à la publication de la première partie de ma réflexion personnelle sur les photos et le yoga. Je pensais provoquer une mini shitstorm, me mettre des gens à dos. Au lieu de ça, j'ai eu de vraiment beaux messages de gens que mon post a fait réfléchir. Et même si tout le monde n'est pas d'accord, le débat était intelligent et respectueux. Parfait <3

Forte de cette expérience, j’aimerai partager la suite de la réflexion que j'ai en ce moment, à savoir la problématique des photos d'asanas (postures) sur les réseaux sociaux.
 
Avec la multiplication des réseaux sociaux et l'omniprésence de l'égo et de l'image dans la société on voit la multiplication exponentielle de photos d'asanas les plus acrobatiques les uns que les autres dans notre quotidien. Parce que, qui voudrait voir quelqu'un faire un simple balasana, right?
Pas pas si right que ça en fait.

Lorsque j'avais posé la question sur Facebook il y a un petit bout de temps, vous avez été nombreuses à me répondre que ce genre de photo vous motivaient vraiment, vous incitaient à vous dépasser et à sortir de votre zone de confort. Vous avez été tout aussi nombreuses à me dire que ce genre de photo vous déprimaient, ou pire, qu'elles vous décourageaient de commencer le yoga.
Wait, WHAT?

Certaines choses que j'ai lu m'ont mis mal à l'aise. Le yoga ce n'est pas des postures acrobatiques. En tout cas pas des postures acrobatiques pour faire des postures acrobatiques. Puisque les asanas (postures) ne sont pas un but, mais un moyen d'arriver à Samadhi, l'illumination ultime, à travers la méditation, que l'on prépare avec les asanas.
Ça change un peu la perspective, non?

Souvent, la posture la plus difficile en yoga: rester en silence et en présence avec soi-même.

Et contrairement à ce que fait croire l'instantanéité d'une photo, je ne connais aucun yogi qui fait des handstands, des scorpions, des danseurs ou des équilibres en torsion sans s'être auparavant échauffé en malade. Et avoir pratiqué plusieurs années souvent. (et ndlr: ce ne sont souvent pas les postures les plus acrobatiques qui sont les plus difficiles à réaliser). Mais ça, on ne le voit pas sur une photo.

Personnellement, j'adore voir l'évolution de mes amis ou de yogis que je suis depuis longtemps. Les voir peu à peu maitriser une posture compliquée et le voir documenter sur leurs réseaux sociaux, je trouve ça vraiment super inspirant. Et croyez moi, lorsque j'aurai mon équilibre sur les mains, vous allez en entendre parler solide :)

Mais la question que je me pose réellement lorsque je vois des photos d'asanas complexes estampillés "yoga" c'est : dans quel but la personne a posté cette image? Pour motiver les gens? Pour faire un changement positif dans la communauté? Pour booster son égo? C'est souvent un combo de ces réponses.
Récemment, je me suis désabonnée de plusieurs comptes de yogis qui ne faisaient poster QUE ça: des photos et des vidéos d'elles en train de faire des postures de folie, comme si leur pratique ne consistait que à faire ça. Et c'est peut-être le cas en fait. Sauf que là, on est clairement dans l'égo, et ce n'est personnellement pas ce que je recherche dans le yoga. Parce que dans les enseignements que j'ai reçu, on m'a appris que l'égo n'était pas un ennemi lorsqu'il n'est pas omniprésent, mais qu'il ne devait pas tout de même pas être trop nourri.

Alors oui, c'est CERTAIN que des images de postures ultra exigeantes et impressionnantes vont amener des gens qui ne s'intéressaient pas au yoga à s'y intéresser et c'est tant mieux! Sauf qu'il ne faut pas oublier que ça va également éloigner certaines personne du yoga et ça, c'est vraiment plate "je ne serais JAMAIS capable de faire tout ça, autant ne pas commencer".
Le yoga est une pratique accessibles à tous. J'insiste sur le tous. Aucun "sauf". Les jeunes, les vieux, les athlètes, les handicapés, tous. Si un prof vous donne l'impression que le yoga n'est pas pour vous, changez de prof. Trouvez votre prof, votre yoga, celui qui vous correspond. C'est aussi simple que ça.

Le yoga, ce n'est pas les kramas (variations des postures) avancés à tout prix. C'est le krama qui convient à votre corps à un instant T. Et votre corps est différent de celui de Tara Stiles ou de Kathryn Budig ou de votre voisine de tapis. Il y a des postures qu'on a instantanément, d'autres qu'on doit travailler fort et d'autre qu'on n'aura jamais. Et c'est bien bien correct : c'est le yoga qui s'adapte à nous et pas nous qui devons nous adapter au yoga. Jamais.


Pour terminer sur une note légère, une vidéo très drôle de JP Sears qui met souvent des coups de pieds dans la fourmilière du développement personnel. Une bouffée d'air frais lorsque l'on commence à trop se prendre au sérieux! #LivingLaYogaLoca

dimanche 10 avril 2016

Les photos en yoga, une réflexion (Partie I)

Disclaimer : il n'y a pas de jugement dans ce post ni de vérité absolue. Mon but est éventuellement d'amorcer une réflexion sur le virage qu'est en train de prendre le Yoga, en apportant ma vision personnelle en temps qu'élève, prof stagiaire et Community Manager.


Je déteste me voir en photo et chaque photo de moi sur les réseaux sociaux est méticuleusement réfléchie. Chacun ses complexes.
Je sais que je ne suis pas la seule et que dans notre société basée sur l'image, la manière dont on nous voit en en public est anxiogène pour beaucoup de monde.

Du coup, je m'inquiète réellement d'une mode qui prend de l'ampleur : prendre les élèves en photos. Que ce soit pendant un cours, un atelier, une retraite. Les photos d'élèves pratiquant le yoga sont omniprésentes sur les réseaux sociaux et pour moi, il y a une vraie question éthique a poser.
Et là, vous allez me dire que j'exagère. Que c'est pas une photo qui fait la différence.
Moi je crois que si, justement. Et encore plus lorsque l'on parle de Yoga.

(le yoga, ce n'est pas une question de ce à quoi tu ressembles, mais de comment tu te sens) 

Dans un cours de Yoga, on apprend à se centrer sur soi, à laisser son ego de côté. À se concentrer uniquement sur ses sensations, ce qu'on ressent, ce qu'on est au plus profond de soi. Pas l'image que l'on renvoie, pas ce que pense le voisin. Juste nous.
Un asana (posture) "correct" ce n'est pas l'image qui est dans un livre, ce n'est pas forcément la posture la plus "esthétique". C'est un alignement anatomique et énergétique en adéquation avec NOTRE corps, et le même asana ne sera pas identique pour deux yogis.

Maintenant, imaginez que quelqu'un sache qu'il y a un risque qu'un de ses asanas se retrouve sur Facebook, parce qu'il sait que son prof le fait souvent, ou bien que le prof a demandé la permission avant le début de la classe et qu'il n'aura pas osé être le seul à dire non. C'est difficile de dire non, surtout à un professeur.
Il va faire quoi? Peut-être réfléchir non plus à ce qu'il ressent, mais à ce à quoi il ressemble. Se déconnecter de lui-même. Avec tout ce que ça implique en risques de blessures par exemple.
Vous voyez?

Et il y a aussi la problématique des photos en savasana (relaxation finale). Où souvent il y a des sourires, des pleurs, des émotions qui sortent.
On a l'habitude de dire que savasana est la posture la plus importante d'un cours de Yoga. C'est un moment extrêmement précieux dans une pratique, où les gens sont en intégration, complètement abandonnés à leurs sensations et dans un état de vulnérabilité extrême.
Ça m'est arrivé une fois de me retrouver en photo, allongée en savasana sur Facebook. Et je me suis sentie tellement mal. Comme si on m'avait volé un moment d'intimité.
Je me dis que si moi, avec mes années de pratiques je me sens mal, imaginez un débutant pas encore à l'aise avec son yoga?

Alors est ce que c'est un point sur lequel on (je) doit travailler, laisser-aller ce contrôle sur mon image, mon ego? Certainement. Mais est-ce que c'est à quelqu'un d'autre de prendre cette décision pour moi? Non. Vraiment pas.

Je ne blâme absolument personne. Et je sais que la plupart du temps lorsque des profs postent des photos de leurs cours sur les réseaux sociaux, cela vient du bon endroit dans leur coeur : l'envie de partager avec le monde une belle expérience, une classe particulièrement forte. Graver dans la mémoire un moment intense. Donner envie à d'autres personnes de faire du yoga, de venir à leurs cours.
Cette envie de partage est tout à fait légitime. Et je sais aussi, par expérience, que l'équilibre entre yoga et marketing est vraiment complexe.

Sauf que j'aimerais vraiment qu'en tant que communauté, on réfléchisse à cette question de l'image. Parce que oui, pour en avoir parlé avec de nombreuses personnes, il y a beaucoup (j'insiste sur "beaucoup") de gens qui ne sont pas à l'aise avec le fait de voir une photo d'eux en classe de yoga sur internet. Et qui n'oseront jamais le dire à leur prof.
Me semble que ce serai une chouette solution que les classes "spéciales  photos" se développent.  Il m'est arrivé d'aller à des classes en tant qu'élève, spécifiquement pour des amies qui avaient besoin de photo/vidéo. Et j'en étais bien heureuse. Mais c'était des classes spécifiques pour ça. Pas ma classe du jeudi midi sur l'heure du lunch ou je veux juste me reconnecter un peu à moi, ni une retraite que j'ai payé plusieurs centaines de dollars pour voir une photo de moi pas maquillée-au-réveil en public sur une page avec 5000 abonnés (note: je ne parle pas ici des grands rassemblements public de yoga, je trouve que la problématique est vraiment différente).

Et j'aimerais avoir votre avis sur tout ça, en tant que prof, ou qu'élève.
Vous en pensez quoi? Vous vous retrouvez dans ces réflexions ou vous trouvez que je suis complément dans le champs?